mardi 28 avril 2015

Théodore de Banville, "Hélène" (Les Exilés)

Théodore de Banville (1823-1891) souffre encore d'un mépris à l'emporte-pièce. J'ai toujours en tête la bêtise de Semprun qui, dans l'introduction d'une anthologie de la poésie française publiée un jour chez Gallimard, affirmait qu'on ne se souvenait de lui que parce que Rimbaud lui avait envoyé ses premiers poèmes...
Et, Semprun, pourquoi le connaît-on ? Juste parce qu'il est issu d'une famille riche qui avait de bonnes relations...
Quand je flâne sur Internet, je rencontre par dizaines des artistes de la trempe de Michel-Ange, Caravage, Picasso, etc. Pour les poètes, il faut l'avouer, c'est plus difficile : l'époque est à l'image, plus personne ne lit, même ceux qui écrivent. Les plus lus nous semblent les plus mauvais, mais qui sommes-nous pour juger ? L'accès illimité crée de nouveaux critères, et même plus : un nouveau paradigme d'appréhension.
Qu'on relise Théodore de Banville, les oeuvres complètes. On n'en donnera ici que des extraits très personnels.

*

Hélène a dix ans ; l'or de sa tête embrasée
Baigne son col terrible et fier comme une tour.
Grande ombre, dans la nuit elle rugit d'amour,
Près d'elle un dur chasseur marche dans la rosée.

Elle ouvre au clair de lune, ainsi qu'une épousée,
La pourpre où de son sein brille le blanc contour,
Et les tigres font voir aux petits du vautour
La fille de Tyndare éprise de Thésée.

Mais près de l'Eurotas aux flots mélodieux
Ils passent, chevelus et forts comme des dieux.
"O tueur de lions, dit la princesse blonde,

Guerrier toujours couvert de sang, tu dormiras
Sur mon sein ; porte-moi dans la forêt profonde."
Et le jeune héros l'emporte dans ses bras.

(juillet 1860)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire